le Château de Saint-Vert

Frédéric Challet


Le château de Saint-Vert appartient jusqu'à la Révolution à l'abbaye de La Chaise-Dieu. Au moment de la vente des biens du clergé (biens nationaux), le curé de Saint-Vert, Claude Champanhac s'en porte acquéreur. Il propose par la suite à la commune de le lui racheter mais celle-ci n'en a pas les moyens. Champanhac, quelques jours avant sa mort (1819), le vend à son successeur, Jean-Augustin Totel, curé de Saint-Vert depuis 1804. Celui-ci le lègue à son neveu, Jean Totel. (Arch. dép. Hte-Loire, V dépôt 22-2)

Sous la Monarchie de Juillet, l'Etat demande aux communes de se pourvoir d'une mairie et d'une école. Les municipalités construisent ou acquièrent des bâtiments. Quand Jean Totel met le château de Saint-Vert en vente, la commune décide de l'acheter. Le bâtiment, situé au centre du bourg, est en effet assez vaste pour abriter la mairie, le presbytère et l'école. La délibération du conseil municipal du 30 novembre 1845 fixe les modalités de cet achat (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-2) :

Monsieur le maire (Vital Vernet) a [...] ouvert la séance et a exposé que la commune n'ayant ni maison d'école ni presbytère, il était urgent de se procurer ces établissement indispensables, [il] propose d'acquérir les propriétés du sieur Totel. A cet effet il soumet au conseil le plan et le procès-verbal d'estimation qu'il a fait dressé par le sieur Briat, expert-géomètre. Le conseil municipal, après un examain suffisant, approuve l'estimation faite par le sieur Briat et vote l'acquisition des immeubles qui y sont énoncés. Et pour faire face à la dépense que nécessitera l'acquisition de ladite maison et dépendances dont le montant est de 4000 francs, vote la somme de 1383 francs 43 centimes en caisse municipale, [et] surimpose une somme de 2000 francs, pour payer la partie affectée à la cure, pendant le temps [...] de trois années. Et attendu qu'il y aura un hangard à bâtir, des réparations à faire au local destiné à la maison d'école et un mobilier à acquérir dont les dépenses s'élèvent à la somme de 1000 francs, le conseil municipal demende un secourd de 1000 francs pour faire face à cette dernière dépense. Pour parfaire le montant de cette vente, le conseil municipal et les plus imposés, pour obvier à des difficultés qui pourraient s'élever sur le partage de ces propriétés, affecte la partie fesant hache (sur le plan) de la maison appelée " le Château " aspect de jour à l'école, ainsi que l'enclos qui se trouve au-devant, plus un are quarante-deux centiares de la terre appelée " le Chènevier " à prendre sur la partie fesant hache aspect de jour et midi ; et au presbytère le surplus de ladite maison aspect de nuit, ainsi qu'une des cave et cuvage qui se trouve au rez-de-chaussée aspect de midi de la partie affectée à l'école, [plus] les deux petits jardins élevés qui se trouvent aspect de midi de ladite maison et de la cour, [plus] une partie de ladite cour à prendre en ligne directe du bâtiment appelé " les Ecuries " aspect de midi directement vers la lettre A dudit plan, et enfin le surplus de la partie fesant hache de la terre apelé " le Chènevier " à prendre en ligne droite du jardin le moins élevé directement vers la partie affectée à l'école, c'est-à-dire vers la lettre B. Et la commune se réserve le bâtiment appelé " les Ecuries ", ainsi que le surplus de ladite cour au-devant aspect de nuit et le surplus de ladite terre appelée " le Chènevier " pour lui donner plus tard une affectation.

Mais cette délibération du conseil municipal est invalidée quelque temps plus tard car elle renferm[e] des clauses contraires à la volonté du vendeur. Elle est remplacée par une autre délibération prise le 31 mars 1846 (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-2) :

Monsieur le maire a exposé que la commune n'a ni presbytère ni maison d'école, que le château de Saint-Vert atte(n)ant à l'église présenterait toutes les conditions désirables pour ces deux destinations, que sur la proposition qui en a été faite par Jean Totel, propriétaire du château, il a été estimé, par des experts choisis par le conseil de la commune, à la somme de 4000 francs, qu'une demende à cette fin a été faite au conseil de la fabrique de l'église de Saint-Vert qui a déclaré, par sa délibération du 4 janvier dernier, que les resources de la fabrique étaient insuffisantes et que l'église ne pouvait donner pour cette acquisition. Sur cet exposé le conseil, assisté des plus imposés [...], a délibéré. Il a été unanimement décidé qu'il fallait faire l'acquisition de ce château pour en faire un presbytère et une maison d'école, que pour le payer il fallait demander l'autorisation de surimposer la commune pour une somme de 2000 francs payable en dix années, dont 1000 francs affecté à l'acquisition de la partie du château appelé " les Greniers " sur la partie fesant haches aspect de jour, ainsi que la totalité de ... toujours au même aspect pour y établir l'école, et 1000 francs pour acheter l'autre partie du château avec toutes ses dépendances pour en faire le presbytère. Le conseil charge monsieur le maire de faire toutes les démarches nécessaires pour obtenir ces autorisations et faire l'acquisition du château, comme aussi il le charge de demender au gouvernement un secour de 2000 francs pour parfaire le payement de cette acquisition.

La dépense est assez considérable pour une petite commune. Le conseil municipal décide, avec l'accord, indispensable, des plus imposés, de surimposer pendant plusieurs années les habitants de la commune et demande en outre une subvention à l'Etat. Mais la vente ne se concrétise pas. En 1850, Jean Totel vend le château de Saint-Vert au curé de la paroisse, Jean-Antoine Tavernier (Arch. dép. Hte-Loire, V dépôt 22-2). Celui-ci propose à la commune de le lui racheter. La commune accepte comme le montre cette délibération du conseil municipal du 31 août 1853 (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-2) :

Le président (le maire, Robert Saugues) a soumis à l'examen et à l'approbation du conseil une lettre de monsieur Tavernier, curé, adressée à monsieur le préfet, sous la date du 29 avril dernier, par laquelle monsieur le curé expose à l'administration que la commune de Saint-Vert est dépourvue de presbytère, de maison d'école et de mairie, et qu'il y a une maison appelée " le Château " qui est plus que suffisante pour faire très convenablement le presbytère, la maison d'école et la mairie. Après un mûr examain, le conseil ayant (reconu) que la susdite lettre renferme l'exposé de la plus exacte vérité, a délibéré et décidé à l'unanimité que : Vu que monsieur le curé [...] n'a acheté la susdite maison que pour la céder à la commune pour les fins ci-dessus exposées et qu'il est disposé à en faire la concession. Vu que cette maison est de facile entretient, la seule convenable pour le presbytère, étant attenante à l'église. Vu que d'après les propositions faites par monsieur le curé 9000 francs suffirait pour l'acquisition et les réparations nécessaires, et qu'à ce prix la commune y trouve de très grands avantages, tandis que si elle laissait échapper cette occasion la commune ne pourrait trouver d'autre maison, pas même d'emplacement convenable pour le presbytère. Vu que de quelque manière qu'on s'y prenne, on ne pourra jamais pour un tel prix se procurer les mêmes avantages. Vu que la commune de Saint-Vert est pauvre et très surchargée d'impôt. Vu que la commune a en caisse la somme de 2000 francs pour la maison d'école, 4000 francs pour les chemins vicinaux et que ces deux sommes réunies forment les deux tiers de la somme nécessaire pour parvenir aux fins ci-dessus énoncées. Vu que les chemins vicinaux sont en très bon état et que les journées de prestations sont plus que suffisantes pour les entretenir et même les améliorer. Pour tous ces motifs, le conseil est d'avis et a décidé à l'unanimité d'employer les 4000 francs destinés aux chemins vicinaux à l'acquisition et réparations de ladite maison pour les fins déjà mentionnées, acceptant les offres et les conditions proposées par monsieur le curé. Vu qu'avec ces deux sommes la commune fournit les deux tiers de la somme nécessaire, elle prie messieurs les sous-préfet et préfet de prendre en considération nos réclamations et de demander au gouvernement un secour de 3000 francs pour le troisième tiers et parfaire par là la somme nécessaire pour mener à fin le projet ci-dessus relaté.

Mais l'administration émet des réserves. L'achat du château par la commune pour y établir la mairie, le presbytère et l'école présente certains inconvénients. Le 26 février 1854, le conseil municipal de Saint-Vert est appelé à répondre à trois objections soulevées par le sous-préfet (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-2) :

Le bruit causé par les exercices des élèves et par la fréquantation habituelle des appartements destinées à la mairie ne troubleront-ils pas le calme et le repos que l'on doit rechercher pour une salle d'école et un presbytère ?
Sur cette proposition le conseil a dit que ces inconvéniants ne pourraient pas avoir lieu parce que le château est construit de manière à ce qu'il n'y aura aucun rapport entre le presbytère et l'école. Les deux entrées du presbytère seront l'une au midi et l'autre au couchant, tous les jours
(les ouvertures) seront de même au midi et au couchant. L'entrée et les jours de la maison d'école seront au levant. L'entrée du presbytère qui est au midi se trouve séparée de celle de l'école par l'église et par un mur du côté du couchant. Le mur mitoyen qui séparera le presbytère de l'école est d'une épaisseur telle que ce qui se passera au presbytère ne sera pas entendu de l'école, et ce sera réciproque. La mairie sera aussi de manière à ne pas déranger l'école. Et puis, dans une petite commune comme celle de Saint-Vert, la salle de la mairie est nécessairement peu fréquentée. Monseigneur, qui connaît tous ces projets et qui a vu les lieux, n'y trouve pas d'inconvénients. Monsieur le curé, qui est la partie la plus intéressée, n'y en trouve pas non plus. Monsieur Gauguet, ex-sous-préfet, et plusieurs inspecteurs qui ont tout visité ont pensé comme le conseil.
Le recueillement des fidèles qui se rendent à l'église n'aur
[a-t-il] pas à en souffrir ?
Les jours de l'école ne donnent pas sur l'entrée de l'église : le recueillement des fidèles ne pourra pas être troublé par les enfants de l'école. Quand même les enfants prendraient leurs récréations auprès de l'église, ce qui arrivera très rarement, cela ne serait pas un grand inconvéniant parce que au moment des récréations les fidèles ne sont pas à l'église. Encore ici, monseigneur et monsieur le curé n'y voient pas d'inconvénients.
La viabilité
(la praticabilité des chemins) de votre commune laisse encore trop à désirer et il serait urgent d'en augmenter les reçources au lieu de les diminuer.
Il n'y a dans la commune que des chemins communaux ; or les chemins communaux, comme le conseil l'a constaté par la délibération du 31 du mois d'août dernier, ne laissent rien à désirer, et les journées de prestations sont plus que suffisantes pour les entretenir et même les améliorer. Le conseil ne voit aucune urgence, pas même de raison pour dépenser ces 4000 francs pour les chemins communaux. Du reste, le conseil a pensé à l'una(ni)mité que l'on ne pouvait pas employer ces fonds à des fins plus raisonnables, plus légitimes et plus conformes aux désirs et ... intérêts de la commune que d'en faire l'emploi demandé. Pour toutes ces raisons, le conseil maintient sa délibération du 31 août dernier et supplie messieurs les sous-préfet et préfet d'user de toute diligences pour mener cette affaire à une prompte et heureuse réussite.

Les réponses du conseil municipal aux objections soulevées par le sous-préfet ne convainquent pas ce dernier. Peu favorable peut-être à l'installation d'une école dans un vieux château, il demande à la commune de construire une maison d'école. La délibération du conseil municipal du 22 juillet 1854 oppose une fin de non-recevoir (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-2) :

Monsieur le maire, président, a fait communication [d'une] lettre de monsieur le sous-préfet ayant pour but de faire prendre une délibération tendant à la construction d'une maison d'école pour les garçons, allég[uant] que le projet d'acquérir le château n'a pas paru se concilier avec les intérêts de la commune. A cette nouvelle dificulté, le conseil a répondu à l'unanimité que ce devait être par erreur, ou à défaut de renseignements, ou sur de faux et malveillants exposés que l'administration avait pu faire une telle appréciation. Le conseil a (répondu) en outre que de contrarier la commune et de s'opposer à ses projets sur le château c'était évidemment contrarier et s'opposer à ses véritables intérêts, ce que ne peut pas vouloir l'administration. Il suffit de voir la propriétée pour voir clairement les grands aventages qui résultent pour la commune de la réalisation de ce projet. Le conseil a encore été d'avis d'absurer que le château n'est pas un de ces vieux châteaux en ruine, mais une très belle et très agréable maison, très bien située, très solidement bâtie et de facile entretien. D'après la lettre de monsieur le sous-préfet, il nous en coûterait tout autant et peut-être plus, avec les embarras de construction, et nous aurions un presbytère et une école qui seraient beaucoup moins bien sous tous les rapports. L'administration, bien mise au courant de tout, ne peut voir qu'avec plaisir que sans de plus grandes dépenses et avec moins d'embarras nous préférerions le mieux, et un grand mieux. Nous serions blâmés de tout le monde si nous ne faisions pas cette acquisition. En conséquence de tout cela, nous votons pour nos premiers projets et maintenons nos premières délibérations (sauf) à donner par une (pièce) particulière tous les détails que pourrait exiger l'administration, et prions très instamment messieurs les sous-préfet et préfet de nous continuer la bienveillance qu'ils nous ont témoignés dès le début de nos démarches et de les faire aboutir au plus tôt.

Visiblement agacé par l'attitude de l'administration, le conseil municipal défend son projet avec opiniâtreté et pugnacité. Mais malgré sa détermination la municipalité ne parvient pas à acheter le château. En 1863, Jean-Antoine Tavernier cède le château de Saint-Vert au curé de Chassignolles, François Vidal (Arch. dép. Hte-Loire, V dépôt 22-2). Celui-ci propose à son tour à la commune de Saint-Vert de le lui racheter. Le conseil municipal examine cette possibilité le 2 juillet 1864 (Arch. dép. Hte-Loire, E dépôt 288-3) :

La séance ouverte monsieur le maire (Robert Saugues) expose que la commune de Saint-Vert se trouve dépourvue de logement pour l'instituteur, de presbytère et de maison commune pour la mairie, qu'il existe au chef-lieu de la commune de Saint-Vert un bâtiment très vaste et solidement bâti ayant appartenu autrefois à la seigneurie de La Chaise-Dieu, que ce bâtiment se compose de plusieurs pièces indépendantes les unes des autres et en outre d'une chènevière et un petit enclos, le tout serait plus que suffisant pour y établir le presbytère, le logement de l'instituteur et y conserv[er] une salle pour déposer toutes les archives de la commune et servir de bureau pour la mairie, que le corps de bâtiment et ses dépendances se trouv[ent] actuellement en vente, que le propriétaire en a fait l'offre à la commune et que le prix en a été débatu et a été fixé à 6200 francs. [Le maire] propose en conséquence que la commune ne pouvant plus rest[er] dans la position qu'elle est actuellement dépourvue de tout logement communaux, qu'elle possède quelques fonds en caisse de (service) mais insuffisants pour faire construire les logements qui sont nécessaires à la commune, qu'alors il y aurait avantage pour elle d'acheter au prix fixé plus haut le bâtiment dit " le Château " et ses dépendances pour être ... en presbytère, logement de l'instituteur et maison communale. Le conseil, après avoir mûrement examiné la proposition [du] maire, considérant qu'il y a un grand désavantage que la commune soit dépourvue de logements communaux, que le bâthiment proposé par [le] maire se trouve très convenablement placé et suffisamment vaste pour être converti en presbytère, maison d'école et logement d'instituteur et maison commune, qu'il y a avantage pour la commune d'acheter au prix ci-dessus stipulé plutôt que de faire construire, en conséquence est d'avis que [le] maire soit autoris[é] à acheter au nom de la commune et passer acte authentique de la susdite propriétée et pour les fins ci-dessus expliqués.

Ce n'est que le 12 mai 1869 que François Vidal vend, pour la somme de 7440 francs, le château à la commune de Saint-Vert. La transaction comprend un immeuble dit " le Château " consistant en un grand corps de bâtiment servant actuellement de presbytère, une écurie et grange séparées par un passage avec cour ; devant, deux tours, plus deux jardins, un pré dit " le Clos ", une terre dite " le Chènevier " ; le tout attenant, situé au chef-lieu de la commune de Saint-Vert, joignant de jour le cimetière, l'église et une maison dite " l'Ecole ", et des autres aspects la voie publique, ayant une superficie totale de 33 ares 68 centiares (Arch. dép. Hte-Loire, O 226-4). Le château doit être réaménagé, des travaux sont nécessaires. Un devis d'architecte daté du 5 avril 1868 évalue à 5164,50 francs la dépense totale des réparations à effectuer. Le document précise l'agencement du bâtiment. Le rez-de-chaussée comprend une grande cave pour le curé et le vicaire, une grande cave pour l'instituteur, une buanderie commune, des lieux d'aisance pour le presbytère et un passage. Le premier étage se compose d'une salle d'école de 71 m 50 de surface, d'un passage (un escalier) pour arriver au deuxième étage où se trouve la mairie et de 4 appartements (4 pièces) pour le curé. Au deuxième étage se trouvent 2 chambres (2 pièces) pour l'instituteur, la salle de la mairie, un passage, la cuisine de l'instituteur, la cuisine du vicaire et la chambre à coucher du vicaire. Enfin, le troisième étage ou galetas est divisé en trois grandes pièces, une pour l'instituteur, une pour le curé et une pour le vicaire. Le logement du curé et celui du vicaire seraient desservis par le grand escalier à vis en granit. Pour accèder au logement de l'instituteur et à la mairie, un escalier extérieur doit être construit sur la façade Est. (Arch. dép. Hte-Loire, O 226)

Pendant un demi-siècle, le château de Saint-Vert abrite l'école, la mairie et le presbytère : la République et l'Eglise sous le même toit. Dans la nuit du 24 au 25 décembre 1921, le bâtiment est en partie détruit par un incendie. Le curé de Saint-Vert de l'époque, Régis Vigouroux, reconstitue les faits dans son journal de paroisse (Arch. dép. Hte-Loire, V dépôt 22-2) :

La nuit de Noël de la présente année (1921) a été d'une température sibérienne. Un vent glacial venant de l'aquilon a hurlé toute la nuit. Aussi [y eut-il] peu d'assistants et de communiants aux messes de minuit terminées à 2 heures du matin. [...] A 5 heures du matin, [je suis] difficilement réveillé par les cris répétés : " Au feu ! Au feu ! ", proférés par messieurs Antoine Barrier, instituteur, et Joseph Coudert, aubergiste. Celui-ci, sommairement vêtu, ouvre le portail et les diverses issues donnant accès à l'intérieur de l'immeuble. Une fois dans la cour, il voit le brasier d'incendie dans une grande salle située au rez-de-chaussée, appelée " le grand salon ", où étaient entassés [de la] luzerne pour [les] lapins et deux cents fagots de bois sec. Avec des secours, on aurait pu alors circonscrire le feu et limiter l'incendie. Mais [il y a] peu d'habitants dans le bourg [et] les villages, [qui sont] éloignés presque tous du chef-lieu, n'ont pu être avertis qu'à 8 heures 30 du matin. A l'arrivée d'une petite pompe, desservie par une douzaine d'hommes, vers les 7 heures, on a jugé opportun et utile de sauver l'église qui faisait partie ou du moins était adjacente à l'immeuble sinistré. A midi, tout danger pour l'église et pour les habitations à côté étant écarté, les pompiers [...] ont repris le chemin de Champagnac. Les ruines de l'immeuble dévasté sont restées fumantes pendant un mois. La cause de l'incendie ? Nul ne la sait avec certitude. On ne peut que faire des hypothèses. Les journaux locaux [...] ont bien donné quelques affirmations mais elles émanent de gens malintentionnés qui veulent donner le change ou rejeter la responsabilité sur le voisin pour se mettre à l'abri du soupçon. Ce qu'il y a de certain, c'est que le vent du nord soufflant avec violence rejetait la flamme contre le presbytère qui pourtant, aux témoignages oculaires des gendarmes, des pompiers et des assistants, n'a brûlé que le dernier. Ce qu'il y a de certain aussi, c'est que la fumée, donnant l'éveil, a réveillé l'instituteur et sa famille qui les premiers ont donné le signal d'alarme. Malgré cela, la cause du sinistre reste inconnue. Tous veulent écarter la malveillance sous le prétexte que [je] n'[ai] pas d'ennemis. Pour moi, l'hypothèse n'est pas purement gratuite quoique je l'ai écartée, sur les conseils des gendarmes, dans l'enquête de police. Mon devoir était de rester car aucun autre curé n'aurait voulu prendre ma place. Les fidèles m'ont logé et nourri pendant un mois, notamment les familles Dégeorge-Bard et Coudert-Gourgouillon. Puis [j'ai établi mon] logement chez le meunier Bruhat (chambre et cuisine) en attendant les réparations à la maison Coudert qui servira de cure provisoire jusqu'à la reconstruction de l'immeuble détruit.

Dans une lettre datée du 8 janvier 1922, le maire de Saint-Vert, Benoît Mestre, informe l'administration que le bâtiment n'était pas assuré. Le préfet s'interroge (lettre du 9 octobre 1924) : Pour quelle raison la commune n'avait pas, ainsi qu'elle aurait dû le faire, assuré l'immeuble dont il s'agit contre les risques d'incendie. N'y a-t-il pas eu, en la circonstance, négligence de la part de la municipalité ? On pense dans un premier temps reconstruire le château en utilisant les murs existants. Mais l'administration préfectorale fait observer que l'installation d'un établissement scolaire tel qu'une école primaire publique (qui doit satisfaire aux conceptions modernes de l'hygiène) dans un château datant du Moyen-Age est des plus critiquables (lettre du 10 avril 1923). Les rares baies percées dans des murs d'épaisseur considérable (rapport de l'architecte du 16 décembre 1925) ne laissent pas suffisamment passer la lumière pour éclairer convenablement une salle de classe. Et une disposition rationnelle des locaux s'avère impossible. Alors les murs du château sont démolis, seule la partie abritant le presbytère est conservée. La commune fait construire une mairie et une école, avec à l'étage le logement de l'instituteur. (Arch. dép. Hte-Loire, O 226-4)





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